4ème trimestre 2015

Veille jurisprudentielle

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DALO

 

OBLIGATION D’INFORMER LE DEMANDEUR SUR LES CONSEQUENCES D’UN REFUS D’UNE PROPOSITION DE LOGEMENT ADAPTE

o   CE, 4 novembre 2015, n°374241            

Monsieur demande au TA de Nice de liquider l’astreinte prononcée dans le cadre d’une injonction faite au préfet de reloger la famille en exécution d’une décision de la commission de médiation (Comed) en date du 8 février 2011, et d’un jugement du TA en date du 26 septembre 2011, assortie d’une astreinte de 2 000 € par mois de retard à défaut de proposition dans un délai de 10 jours.

Une offre de logement a été faite à la famille qui l’a refusée.

Dans ces conditions, le juge a refusé en première instance de faire droit à la demande de Monsieur et d’ordonner au préfet de le reloger et de liquider l’astreinte. Le juge considère que le logement proposé par le préfet correspondait aux besoins de la famille et que son refus, qui ne reposait pas sur des motifs impérieux, lui avait fait perdre le bénéfice de la reconnaissance du caractère prioritaire de sa demande. Dès lors le préfet est délié de son obligation de résultat.

Le Conseil d’Etat rappelle les dispositions de l’article R. 441-16-3 CCH :

« Le bailleur auquel le demandeur est désigné informe ce dernier, ainsi que, le cas échéant, la personne assurant l’assistance […], dans la proposition de logement qu’il lui adresse, que cette offre lui est faite au titre du droit au logement opposable et attire son attention sur le fait qu’en cas de refus d’une offre de logement tenant compte de ses besoins et capacités il risque de perdre le bénéfice de la décision de la commission de médiation ».

Le Conseil d’Etat considère, conformément aux dispositions règlementaires, que c’est seulement si la personne a été informée des conséquences d’un refus qu’il peut lui faire perdre le bénéfice de la décision de la Comed. C’est au préfet de rapporter la preuve que cette information a été donnée. Dans le cas où la personne n’aurait pas reçue une telle information par le bailleur, le juge ne peut pas considérer que l’administration est déliée de son obligation de relogement.

Une proposition de relogement ne correspondant pas aux besoins des ménages ne fait pas disparaître l’obligation de relogement

 

o   CE, 23 décembre 2015, n°379940

Un couple et leurs trois enfants ont été reconnus prioritaires par la commission de médiation. Ils acceptent une proposition de logement d’une seule pièce et d’une surface de 36 m². Ce logement n’étant pas adapté à leurs besoins, la famille saisit le juge administratif.

Le Conseil d’Etat rappelle que « le juge, saisi sur le fondement de l’article L. 441-2-3-1 CCH […], doit, s’il constate qu’un demandeur a été reconnu […] comme prioritaire et devant être logé ou relogé d’urgence et que ne lui a pas été offert un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités définis par la commission, ordonner à l’administration de loger ou reloger l’intéressé, sauf si elle apporte la preuve que l’urgence a complètement disparu ». Puis il précise que le fait que la famille ait accepté le logement ne fait pas disparaître l’urgence, compte tenu des caractéristiques de ce logement. En effet, dans cette situation, le logement n’étant pas adapté aux besoins des requérants, le juge considère qu’ils sont toujours dans une situation d’urgence leur permettant d’être reconnus comme prioritaire et devant être relogés en urgence.

 

LIQUIDATION ASTREINTE

o   TA Lyon, 17 novembre 2015, n°1205564

Le tribunal avait enjoint au préfet, par une décision du 26 juin 2012, d’exécuter dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 100 € par jour de retard, la décision de la Comed en proposant une solution d’hébergement à la famille. Le montant de ces astreintes est versé au fonds national d’accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL).

Si le préfet se défend en attestant avoir hébergé la famille du 30 janvier au 30 mars 2012 dans le cadre du dispositif hivernal puis du 8 décembre 2012 au 1er juillet 2013 dans un village mobile, ces hébergements ne sont pas de nature pérenne au sens de la loi DALO et le préfet ne peut être considéré comme ayant rempli ainsi son obligation de relogement.

Le juge procède ainsi à la liquidation de l’astreinte de 100 € par jour de retard, en la limitant, du fait des hébergements provisoires, à la somme de 90 000 € à verser au FNAVDL.

Le montant de l’astreinte est porté à 150 € par le juge à défaut pour le préfet de justifier de l’exécution de la décision de la Comed de relogement dans un délai d’un mois.

RECOURS INDEMNITAIRE

o   TA Toulon, 29 octobre 2015, n°1401906             

Un couple et leurs deux enfants, dont la demande de logement a été reconnue prioritaire et urgente par la Comed avaient saisi le juge administratif qui, dans une décision du 17 janvier 2012,  avait ordonné le relogement de la famille avant le 1er mars 2012 sous astreinte de 400 € par mois de retard. Toujours sans solution de relogement, la famille avait engagé une demande d’indemnisation restée sans réponse. La famille saisit le juge, se trouvant plus de 4 ans après la décision de la Comed et un an et demi après celle du juge toujours sans solution.

Le juge reconnaît que l’absence de proposition de logement est constitutive d’une carence de l’administration et que la famille peut dès lors demander l’indemnisation des troubles subis du fait de l’absence de proposition de logement.

Le juge condamne l’Etat à verser à Monsieur et Madame une somme de 5 500 € chacun et 1 000 € à chacun de leurs deux enfants pour les indemniser des conditions d’existence subies et du préjudice moral.

 

EXPULSIONS LOCATIVES

 

INDECENCE ET EXPULSION LOCATIVE

o  CA Paris, 5 novembre 2015, n°14/02507             

Madame vit dans un logement indécent et impropre à l’habitation. Après plusieurs sommations de payer, la locataire est assignée au tribunal pour obtenir la résiliation du bail et l’expulsion. Le tribunal ordonne l’expulsion. La locataire interjette appel de cette décision.

La Cour rappelle qu’en louant un logement dépourvu de chauffage normal et n’offrant ni les dimensions ni le volume minimum requis, le bailleur a manqué à son obligation de délivrer un logement décent à sa locataire conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 et au décret du 30 janvier 2002 relatif à la décence du logement.

Toutefois, le juge rappelle que l’indécence du logement ne fait pas obstacle à ce que la résiliation du bail soit prononcée. Depuis le 1er janvier 2013, Madame ne règle plus son loyer et son indemnité d’occupation. En l’absence de permission du juge, elle ne peut s’abstenir de payer son loyer. Le non-paiement des loyers justifie la résiliation du bail.

En revanche, le caractère indécent du logement interdit à la Cour, en application des dispositions de l’article 1719 du code civil d’ordonner l’expulsion à défaut de remboursement de la dette de loyers.

L’article 1719 du code civil prévoit :      
« Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulations contraires :
1° De délivrer au preneur la chose louée, et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant […] ». 

 

TROUBLES DE JOUISSANCE CAUSES PAR LES ENFANTS MAJEURS

o   CA Paris, 26 mai 2015, n°13/19520        

Monsieur, locataire du parc HLM, est assigné au tribunal afin que le juge prononce la résiliation du bail et ordonne l’expulsion en raison des troubles de jouissance causés par son fils majeur.

Le juge prononce la résiliation du bail et ordonne l’expulsion de Monsieur sans délai. Ce dernier fait appel de cette décision.

La cour d’appel considère toutefois que Monsieur refuse depuis 2010 d’héberger son fils majeur, atteint de troubles psychiques comme le certifie les attestations de voisins et de sa fille. Monsieur, comme les autres locataires de l’immeuble et professionnel, a peur de son fils, lequel ne squatte pas son logement mais les parties communes de l’immeuble.

Dès lors, la cour reconnaît que Monsieur ne peut être tenu pour responsable des nuisances causées par son fils majeur qui n’habite pas chez lui. D’autant plus que le bailleur ne rapporte la preuve que de faits anciens.

Enfin, la cour considère en outre que l’expulsion de Monsieur, âgé, qui a de faibles ressources, ne mettrait pas fin au problème de l’occupation des parties communes par son fils, qui y reviendrait quand même car il y a vécu dans son enfance.  

 

OCTROI DE DELAIS POUR QUITTER LES LIEUX SUITE A LA DELIVRANCE D’UN CONGE POUR VENTE

o  TI Paris, 17 décembre 2015, n°717/2015            

Madame est locataire d’un logement pour lequel elle s’est vue délivrer un congé vente.

Madame, n’ayant pas pu quitter les lieux à l’expiration du délai donné par le congé, occupe sans titre le logement. Madame y demeure depuis 20 ans, ne perçoit que le RSA et a deux enfants à charge, handicapés. Le bailleur quant à lui est propriétaire de 9 lots dans le même immeuble. Madame a cherché à se reloger dans le parc social depuis de nombreuses années, sans solution, alors même qu’elle a été reconnue prioritaire à reloger en urgence par la commission de médiation.

Le juge ordonne l’expulsion des occupants, mais octroie un délai pour quitter les lieux de 36 mois (délai maximal) au vu de la situation des occupants.

 

LE DROIT D’UN RESIDENT DE FOYER D’HEBERGER SON CONJOINT ET SES ENFANTS

o   TI Paris, 14 janvier 2016, n°11-15-000652

Madame occupe depuis 2010 une chambre dans un foyer. En 2012, elle s’est mariée, et la famille, aujourd’hui composée de 5 personnes y réside.

Madame est assignée par l’association gestionnaire du foyer en résiliation du contrat d’occupation et en expulsion, au motif qu’elle aurait enfreint le règlement intérieur en hébergeant sa famille.

Or le juge relève que le règlement intérieur, contrairement aux allégations de l’association, ne comporte aucune disposition prévoyant qu’aucun enfant ne peut être autorisé à résider dans la chambre. Le juge considère que l’association ne pouvait déduire de la disposition du règlement intérieur qui énonce que le résident dispose d’une chambre individuelle, qu’il lui est interdit d’y héberger son conjoint et ses enfants.

Le juge rappelle les dispositions de l’article R. 633-9 du code de la construction et de l’habitation qui prévoient les conditions dans lesquelles une personne logée en foyer peut héberger un tiers et rappelle que la Cour de Cassation a, dans un arrêt du 22 mars 2006, posé le principe que si une clause du contrat peut interdire d’héberger des personnes, cette interdiction ne peut pas concerner des proches et que les clauses du contrat d’habitation ne peuvent avoir pour effet de priver le preneur de la possibilité d’héberger ses proches.

Dès lors, l’association ne peut se prévaloir de nuisances occasionnées par son époux, d’autant plus que pour apprécier les manquements, le juge doit se placer le jour où il statue. Or en l’espèce, aucun élément ne permet d’établir que les nuisances sonores aient perduré. Le juge rejette la demande de résiliation de bail et d’expulsion.

 

HABITAT INDIGNE

 

DESORDRES SUR LES PARTIES COMMUNES ENGEANDRANT UN ARRETE DE PERIL ET LA SUSPENSION DU PAIEMENT DES LOYERS

o   CAA Aix-en-Provence, 23 juin 2015, n°2015/367 et 12 janvier 2016, n°2016/9

Dans ces deux dossiers, les locataires saisissent le juge afin qu’il ordonne à leur propriétaire le remboursement de loyers perçus sous arrêté de péril.

Le tribunal d’instance a considéré que la suspension du paiement des loyers ne s’appliquait pas puisque l’arrêté de péril ne porte que sur les parties communes et sur les parties privatives de deux autres appartements.

Mais la Cour d’appel revient sur ces décisions et considère que « l’identification du local visé par l’arrêté de péril ne se confond pas avec la localisation des désordres engendrant le péril. En l’espèce, l’arrêté vise globalement l’immeuble en copropriété et vise le nom des copropriétaires dont celui de Mr X., et concerne notamment des parties communes, de telle sorte qu’il importe peu que l’appartement privatif occupé par Madame ne soit pas principalement touché par les travaux de remise en état ».

La cour d’appel condamne donc le propriétaire à payer respectivement les sommes de 16 390 euros et 6 326 euros aux deux locataires, au titre des loyers indûment perçus sous arrêté de péril.

RAPPORTS LOCATIFS

 

ANNULATION D’UN CONGE POUR VENTE ET PREUVE DU PREJUDICE SUBI

o  Cass. 3è civ., 8 octobre 2015, n°14-20.666

Les propriétaires délivrent un congé pour vente à leurs locataires avec offre de vente au prix de 190 000 euros, frais d’agence inclus. Les locataires ont initialement accepté cette offre puis proposé d’acquérir le bien au prix de 140 000 euros. Cette proposition est refusée par les propriétaires qui les assignent en validation du congé et expulsion.

La cour d’appel valide le congé et ordonne l’expulsion.

La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel en précisant que « si le locataire, titulaire d’un droit de préemption, qui accepte l’offre de vente du bien qu’il habite ne peut se voir imposer le paiement d’une commission renchérissant le prix du bien (ici les frais d’agence pour trouver un acquéreur), le prononcé de la nullité du congé suppose (…) la preuve d’un grief ». Or en l’espèce, les locataires ne rapportent pas la preuve d’un préjudice subi ni d’aucune incidence sur l’exercice du droit de préemption des locataires, du fait de l’intégration de la commission dans le prix de vente. Dès lors, la Cour rejette la demande d’annulation du congé-vente.

 

MODIFICATIONS DES CONDITIONS DU CONTRAT DE LOCATION D’UN LOGEMENT MEUBLE ET CLAUSES ABUSIVES

o  Cass., 3è., 17 décembre 2015, n°14-25523        

Un contrat de location est passé entre un professionnel de l’immobilier et un locataire. Il porte sur une location meublée, pour une durée de 3 ans. En 2006, à deux reprises, les parties modifient les conditions initiales du contrat de bail, relatives notamment au loyer et à la détermination des charges incombant au locataire.

En 2009, le bailleur notifie au locataire un congé « en vue de la réévaluation du loyer ».

La Cour de cassation confirme l’annulation du congé prononcé par la cour d’appel au motif que ce dernier n’était fondé ni sur la décision du bailleur de vendre ou reprendre le logement, ni sur un motif légitime et sérieux, mais procédait de la seule intention du bailleur d’augmenter le loyer.

De plus, la Cour revient sur l’arrêt de la cour d’appel au sujet des clauses abusives. La Cour rappelle que le code de la consommation prévoit que dans « les contrats conclu entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».

La clause du contrat qui prévoit que « le locataire remboursera au bailleur toutes les charges, quelle qu’en soit la nature, y compris les frais d’entretien ou de réparations des parties communes, afférentes tant aux biens loués qu’à l’immeuble dans lequel il se trouve, sauf l’assurance de l’immeuble et les honoraires de gestion » est considérée par la Cour comme abusive dès lors qu’elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

ANNULATION DU CONGE POUR REPRISE FRAUDULEUX

o  TI Paris, 29 décembre 2015, n°738/2015

Un bailleur privé délivre un congé pour reprise à son locataire. Il avance que son fils reprendra le logement. A l’expiration du délai pour quitter les lieux, le bailleur assigne le locataire, devenu occupant sans titre, afin que le juge ordonne son départ, et éventuellement son expulsion, ainsi que le paiement d’une indemnité d’occupation.

La locataire a un doute sur la validité du congé et demande son annulation.

Le juge estime que le fils n’a pas eu réellement l’intention de reprendre le logement et considère qu’il y a eu fraude du bailleur. En effet, quatre mois avant l’échéance du congé, le fils souscrivait un bail de location de trois ans, dont rien ne laissait penser qu’il s’agissait d’une résidence provisoire. De plus, en 2010, le bailleur avait délivré un congé vente sur le même logement.

Le juge estime que le congé est frauduleux, pas dans la forme mais au regard du motif invoqué. Il constate la poursuite du bail après échéance du congé.

>> Rappel : la loi Alur prévoit, pour les contrats conclus après le 27 mars 2014 et pour les contrats conclus avant depuis l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2015 qui prévoit l’application de ces nouvelles dispositions à tous les contrats, la possibilité pour le juge d’exercer un contrôle a priori sur les congés. Dans cette situation, pour des questions d’application de la loi dans le temps, le juge n’a pu procéder qu’à un contrôle formel, se limitant à vérifier si la délivrance du congé résulte ou non d’une fraude avérée du bailleur.

 

o  TI Lyon, 30 novembre 2015, n°3371      

Madame, âgée de 81 ans, était locataire d’un logement depuis 40 ans. Un congé pour reprise au 30 septembre lui a été signifié par le propriétaire du logement. Compte tenu de ses ressources financières, Madame n’a trouvé à se loger qu’en dehors de Lyon.

Madame fait valoir que la bénéficiaire de la reprise, la petite-fille du propriétaire, n’est en réalité jamais venue occuper le logement, qui est resté inoccupé plusieurs mois avant d’être finalement de nouveau proposé à la location.

Deux ans après la date à laquelle Madame a dû quitter les lieux, elle fait assigner le propriétaire devant le tribunal afin que le congé pour reprise soit déclaré frauduleux.

Le juge constate que si le formalisme du congé a été respecté par le bailleur (nom et adresse du bénéficiaire de la reprise), il constate que le bénéficiaire de la reprise n’a jamais occupé l’appartement qui a subi des travaux et été reproposé à la location. Le juge considère que le bailleur savait que des travaux seraient nécessaires après 40 années d’occupation du logement, et cela n’est pas un motif valable pour justifier de l’occupation différée de sa petite-fille. D’autant plus que le juge constate que le propriétaire a utilisé le même procédé pour récupérer un autre appartement.

Il en conclut donc que le congé est frauduleux. Il condamne le propriétaire à payer à l’ancienne locataire la somme de 4 638 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel (coût du déménagement, du surcoût du nouveau loyer), et 6 000 € en réparation de son préjudice moral (du fait de son âge et de la durée d’occupation de ce logement). Pour information, le propriétaire a fait appel de cette décision.

 

ANNULATION D’UN CONGE POUR MOTIF LEGITIME ET SERIEUX BASE SUR UN IMPAYE DE LOYER – OBLIGATION DE DELIVRER PREALABLEMENT UN COMMANDEMENT DE PAYER

o   TI Paris, 20 août 2015, n°11-14-001333

Monsieur et Madame ont signé un bail avec le propriétaire. Le bailleur avance que les locataires n’ont jamais payé le dépôt de garantie et ils ne s’acquittent pas du paiement des loyers et charges avec régularité (une somme de 1 820 € reste due). Pour cette raison, le bailleur leur a délivré un congé pour motif légitime et sérieux. Il les assigne aux fins de voir prononcer la validité du congé, la résiliation du bail et l’expulsion.

Les locataires expliquent s’être acquittés du règlement du dépôt de garantie auprès de la première bailleresse qui s’est faite passer pour la propriétaire. Après régulation de la situation, ils n’avaient pas les moyens de payer un autre dépôt de garantie. Quant à leur dette, elle sera réglée par le Fonds de Solidarité Logement (FSL).

Le juge condamne les locataires au paiement des impayés de loyers et charges, mais invalide le congé délivré sur ce motif. Il rappelle : que la loi prévoit dans ce cas la délivrance d’un commandement de payer aux locataires avant de solliciter l’acquisition de la clause résolutoire, voire la résiliation judiciaire du bail. Il rappelle l’importance de cette formalité pour faire prendre conscience aux locataires du risque qu’ils encourent d’être expulsés de leur domicile.

 

EXPULSION OCCUPANTS SQUATS OU BIDONVILLES/EVACUATION

 

RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX ET DU PRINCIPE DE DIGNITE POUR LES OCCUPANTS DE BIDONVILLES

o  CE, 23 novembre 2015, n°394540

Le juge des référés du TA de Lille avait été saisi par plusieurs associations, lui demandant d’enjoindre au préfet de prendre plusieurs mesures nécessaires à la protection et à la mise en œuvre des droits fondamentaux des personnes vivant dans le bidonville de Calais.

Le TA de Lille a enjoint au préfet et à la commune de procéder, dans un délai de 48 heures :
– au recensement des mineurs isolés en situation de détresse et de se rapprocher du département en vue de leur placement ;        
– à la création de points d’eau supplémentaires ;           
– la mise en place de latrines ;  
– la mise en place d’un dispositif de collecte des ordures ;          
– permettre l’accès des services d’urgence sur le site.

Le Ministre de l’Intérieur et la Commune de Calais demandent au Conseil d’Etat d’annuler cette ordonnance.

Le Conseil d’Etat rappelle qu’il appartient aux autorités titulaires du pouvoir de police générale, garantes du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine, de veiller, notamment, à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti.

En l’espèce le juge constate que l’accès à l’eau et aux toilettes ainsi qu’à l’alimentation est insuffisant ; qu’aucun ramassage des ordures ménagères n’est réalisé, exposant ainsi les occupants à des risques élevés d’insalubrité ; que les véhicules d’urgence, d’incendie et de secours ne peuvent pas accéder au site. Cette situation constitue une carence caractérisée de l’Etat de nature à exposer ces personnes à des traitements inhumains ou dégradants, portant ainsi atteinte à la liberté fondamentale qu’est la dignité humaine. Le juge confirme les mesures prescrites par le TA de Lille et ordonne le début de leur réalisation dans un délai de huit jours, sous astreinte pour chacune d’elle de 100 euros par jour de retard. Il rejette dès lors le recours du Ministère de l’Intérieur et la requête de la Commune de Calais.

 

OCCUPATION CONTRAIRE AUX REGLES D’URBANISME ET PRINCIPE DE PROPORTIONNALITE

o   Civ. 3ème 17 décembre 2015, n°14-22095

Une famille avait procédé à des installations démontables ou en dur sur une parcelle sur laquelle les règles d’urbanisme interdisaient l’implantation de constructions à usage d’habitation, camping, caravanes ou habitations légères de loisir. Sur la base de cette infraction aux dispositions du plan local d’urbanisme (PLU), la commune les assigne pour obtenir l’enlèvement des installations.

La Cour d’appel confirme l’infraction aux règles d’urbanisme et considère que l’article 8 de la CEDH et le droit au logement ne peuvent y faire obstacle, faire disparaître le trouble qui en résulte ou effacer son caractère manifestement illicite.

La Cour de Cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel en considérant « qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les mesures ordonnées étaient proportionnées au regard du droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».

 

DROIT DE PROPRIETE v. DROITS FONDAMENTAUX DES OCCUPANTS DE TERRAINS SANS TITRE ET OBLIGATIONS DES COLLECTIVITES TERRITORIALES EN MATIERE DE LUTTE CONTRE L’EXCLUSION ET LA PAUVRETE

o  CA Toulouse, 4 novembre 2015, n°1303/2015   

La Métropole et Commune de Toulouse demandent l’expulsion de 80 personnes qui occupent sans titre une parcelle dont ils sont propriétaires.

La Cour d’appel, saisie de cette affaire, rappelle que le « juge français, qui est gardien des libertés individuelles, doit apprécier la légalité de [l’expulsion] qu’il est en droit d’ordonner, à l’aune du principe de proportionnalité et des principes édictés par la CEDH que la France a ratifié ».

Dans cette situation, les occupants sont installés depuis des mois voire des années. Nonobstant les conditions d’habitat précaire voire insalubre, le juge constate que de nombreux enfants sont scolarisés, un travail de suivi sanitaire et social a été engagé, des démarches ont été accomplies auprès de Pôle Emploi.

Il rappelle que « même si la commune n’a pas vocation à se substituer à l’Etat, dans le cadre de la politique d’aide à l’insertion des populations issues de la communauté Rom, l’article L. 115-1 du code de l’action sociale et des familles fait obligation aux collectivités territoriales de poursuivre une politique de lutte contre les exclusions qui tend à garantir l’accès effectif aux droits fondamentaux et à prévenir ou supprimer toutes les situations pouvant engendrer la pauvreté ou l’exclusion ».

La Cour confirme l’ordonnance rendue en première instance en considérant qu’une expulsion sans mesure d’accompagnement ou de relogement plongerait les occupants dans une précarité plus grande encore que celle dans laquelle ils vivent actuellement, mettrait en danger les enfants et porterait atteinte à l’article 8 de la CEDH et 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant.

 

ANNULATION DE L’ASSIGNATION EN EXPULSION POUR GARANTIR LES DDROITS FONDAMENTAUX DES OCCUPANTS

o   TGI Montpellier, 22 décembre 2015, n°15-31714

La propriétaire en indivision d’un terrain assigne des familles et demande leur expulsion du terrain où elles se sont installées sans titre avec leurs véhicules et caravanes.

Le juge ne fait pas droit à sa demande d’expulsion. Dans le cadre d’un examen précis de la situation des parties, il s’interroge sur la réalité de l’atteinte au droit de propriété dès lors que l’expulsion n’a été demandée qu’un an après l’installation et qu’elle n’émane que d’une co-propriétaire indivi qui ne détient qu’un 7ème du terrain.

A l’inverse, le juge considère, au regard de la situation des occupants, qu’une mesure d’expulsion leur serait préjudiciable puisqu’elle porterait atteinte à plusieurs de leurs droits. Notamment le droit à la scolarisation des enfants qui bénéficient d’une intervention spécifique de la Ligue des droits de l’Homme, leur droit à la santé puisqu’elle mettrait fin au suivi médical dont ils bénéficient, ainsi qu’aux démarches d’insertion entreprises.  

Le juge constate la stabilité de leur occupation et considère que cet habitat précaire constitue pour eux un domicile au sens de la jurisprudence de la CEDH.

Dans ces conditions, il ne fait pas droit à la demande d’expulsion considérant que « dans ces conditions, expulser les occupants de la parcelle concernée sans autre solution à leur proposer que l’errance mettrait non seulement brutalement un terme, et au cœur de l’hiver, à la relative stabilité de leurs conditions de vie depuis l’été 2014 mais les placerait dans une plus grande précarité encore, précarité préjudiciable à tous et surtout aux enfants dont l’intérêt supérieur doit être préservé.

>> De plus en plus de juridictions se fondent sur la jurisprudence Winterstein de la CEDH pour accorder des délais ou refuser d’expulser les occupants. Voir par exemple sur le site de Jurislogement : TGI Evry, 5 mai 2015, n°15/00206 ; TGI Bobigny, 2 juillet 2014, n°14/01011 ; TGI Bobigny, 24 janvier 2014, n°13/02254, etc.

 

OCTROI DE LARGES DELAIS POUR L’EXPULSION D’OCCUPANTS SANS TITRE EN PHASE D’INSERTION

o   TGI Ivry, 16 octobre 2015, n°2015/373

Les occupants sans titre d’un immeuble sont assignés par le propriétaire qui demande leur expulsion.

Le juge rappelle que la seule occupation sans titre ne fait pas naître l’urgence. Si le propriétaire évoque un projet de réaménagement avec démolition puis reconstruction du bâtiment, il ne justifie ni du caractère imminent de ces travaux, ni en conséquence de l’urgence à voir prononcer l’expulsion des occupants, alors que les travaux ne débuteront qu’à compter de 2020. Le juge constate qu’aucun élément d’urgence n’est rapporté pour justifier de la dangerosité du bâtiment. Au contraire, les occupants attestent, par le biais de photographies et d’attestations, d’un entretien régulier du bâtiment.

Si le juge reconnaît l’atteinte portée au droit de propriété et ordonne l’expulsion, il tient compte de l’absence d’urgence à expulser les familles, notamment avec des enfants scolarisés, et pour lesquelles un accompagnement social est en cours. Il procède à un examen de proportionnalité afin de fixer des délais pour l’expulsion en fonction des situations respectives du propriétaire et des occupants.

Le juge accorde les plus larges délais, à savoir trois ans, considérant la situation personnelle, financière et professionnelle fragile des occupants. Le juge fonde sa décision d’octroi de larges délais sur le caractère de stabilité que l’occupation permet, pour leur permettre d’engager des démarches d’insertion, avec l’appui d’une association. En effet, des démarches de recherches de logement et d’hébergement ont pu être engagées – certains des occupants se sont d’ailleurs relogés ; les enfants ont pu être scolarisés ; mais également des démarches d’insertion professionnelles ont été faites. Le juge constate qu’une expulsion mettrait leurs efforts à néant.

 

DROIT A L’EAU

 

CONDAMNATION AU RETABLISSEMENT DE LA DESSERTE EN EAU SUITE A UNE COUPURE ORONNEE PAR L’ORGANISME HLM

o  TI Fontainebleau, 12 novembre 2015, n°12-15-000053

Les requérants occupent un logement sans titre depuis plusieurs mois, qui appartient à un office public de l’habitat. Cet office ordonne à la société Veolia Eau de procéder à la suppression des branchements en eau. Quelques jours plus tard, l’eau était coupée. Une demande de rétablissement est faite, en vain. Les occupants saisissent donc le juge des référés afin qu’il ordonne le rétablissement de l’eau et le versement d’indemnités.

Le juge, après avoir considéré que les occupants avaient droit à une aide de la collectivité pour la fourniture en eau (comme prévu par le code de l’action sociale et des familles) conclut qu’une interruption de la fourniture en eau n’aurait jamais dû intervenir. Il ordonne à la société Veolia de procéder au rétablissement de la desserte en eau, dans un délai de 15 jours sous astreinte de 500 euros par jour de retard pendant une durée de 4 mois.

>> Pour rappel sur le même sujet, voir la décision du Conseil constitutionnel n°2015-470 du 29 mai 2015.

 

HEBERGEMENT

 

RECONNAISSANCE D’UNE SITUATION DE DETRESSE MEDICALE, PSYCHIQUE OU SOCIALE

o   CE, 24 juillet 2015, n°391884    

Dans une ordonnance du 3 juillet 2015, le juge des référés du TA de Nantes ordonne au préfet d’héberger une famille en situation de détresse.

Le Conseil d’Etat rappelle que cette famille, déboutée d’asile, ne pouvait plus solliciter un hébergement dans le cadre du dispositif asile. Il précise toutefois que les dispositions du code de l’action sociale et des familles garantissent le droit à l’hébergement d’urgence pour toute personne en situation de détresse médicale, psychique ou sociale.

En l’espèce, Madame dispose d’une carte d’invalidité et souffre d’une pathologie grave. Un certificat médical spécifie en particulier que sa situation rend indispensable un hébergement dans des conditions de salubrité suffisante. Ses enfants majeurs qui vivent avec elles sont quant à eux psychologiquement fragiles. Dans ces conditions, le juge considère que le préfet qui n’héberge pas cette famille dans le cadre du dispositif de la veille sociale porte atteinte à leur droit à un hébergement d’urgence comme liberté fondamentale.

 

ANNULATION D’UNE DECISION DE FIN DE PRISE EN CHARGE EN HEBERGEMENT D’URGENCE CONFORMEMENT AU PRINCIPE DE CONTINUITE

o   TA Lyon, 2 décembre 2015, n°1304782

Monsieur et Madame, déboutés du droit d’asile, sont en procédure de réexamen de leur demande d’asile. Alors qu’ils bénéficiaient d’une prise en charge en hébergement d’urgence, par une décision du 20 juin 2013, le préfet leur signifie la fin de prise en charge de leur hébergement dans le cadre du dispositif hivernal, avec leurs deux enfants de 11 et 13 ans. A la suite de laquelle, malgré leurs démarches, ils n’ont bénéficié d’aucune autre proposition d’hébergement.

Le juge prend en considération l’état de santé de Madame, qui nécessite un traitement continu et un suivi médical, et qui a été hospitalisée à plusieurs reprises. Il constate également que la famille n’a pas souhaité la fin de prise en charge, que son comportement n’a pas rendu impossible son maintien dans cette structure ni l’orientation vers une autre solution adaptée, et enfin qu’aucune autre possibilité d’orientation n’a pu être mise en œuvre. Il considère alors que la famille est en droit de demander l’annulation de la décision du préfet de fin de prise en charge, et enjoint au préfet d’héberger la famille dans un délai de 8 jours.

 

PRISE EN COMPTE DE L’ELOIGNEMENT DES LIEUX DE SCOLARITE ET D’ACTIVITE PROFESSIONNELLE

o   TA Nantes, 4 novembre 2015, n°1508722          

Saisi dans le cadre d’un référé-liberté, le juge, dans une ordonnance du 24 septembre 2015 a enjoint au préfet d’héberger la famille dans un délai de 48 heures. Si un hébergement a bien été proposé dans le délai, la famille ne l’a pas accepté au motif qu’il éloignait la famille du lieu de scolarisation des enfants et du lieu de travail de Madame.

Sur la base de l’article L. 521-4 du code de justice administrative, la famille demande au juge des référés de modifier la mesure qu’il avait ordonné, au vu du nouvel élément, en enjoignant au préfet d’indiquer un lieu d’hébergement dans l’agglomération nantaise susceptible de les accueillir avec leurs enfants dans un délai de 72 heures, au regard des circonstances particulières de scolarisation des enfants et de l’insertion professionnelle de Madame. Ce que fait le juge.

 

o   TA Nantes, 18 décembre 2015, n°1510420

Madame, déboutée de sa demande d’asile, ne bénéficie plus d’une prise en charge dans un hébergement au titre de l’asile. Si elle a pu bénéficier de solutions très ponctuelles et précaires, elle ne bénéficie d’aucune solution d’hébergement à ce jour, malgré ses démarches.

Madame est suivie pour un cancer et une dépression sévère. Son état de santé nécessite une prise en charge en hébergement. Le juge reconnaît dès lors la détresse médicale et sociale dans laquelle se trouve Madame, et constatant l’atteinte portée par le préfet aux droits de Madame, lui enjoint de l’héberger dans les 48 heures.

 

o  TA Nantes, 24 septembre 2015, n°1507859       

Un couple et leurs trois enfants sont sans-abri suite à une fin de prise en charge en hébergement d’urgence. Monsieur souffre de problématiques de santé, et leur plus jeune enfant a deux ans. Madame quant à elle travaille à temps partiel et les autres enfants sont scolarisés. Les faibles ressources du couple ne leur permettent pas de se loger dans le cadre des circuits de droit commun

Le juge considère, au regard de la présence d’un jeune enfant et de l’état de santé de Monsieur, que la famille qui ne s’est vue proposer aucune autre solution d’hébergement est en situation de détresse sociale et qu’il incombe dès lors au préfet de faire face à cette situation d’urgence en proposant, dans un délai de 48 heures, un hébergement d’urgence à la famille, malgré la saturation du dispositif d’hébergement d’urgence.             

o   TA Nantes, 16 mars 2015, n°1502164   

Madame est en France avec ses trois enfants. Les deux derniers viennent de naître, sa sortie de la maternité étant programmée le 17 mars 2015. Le père des enfants ne souhaite pas en assurer la charge et Madame est dans une détresse particulière du fait de son état de santé préoccupant et de la particulière vulnérabilité des deux nourrissons.

Le juge considère que « la précarité de [Madame] établit la condition d’urgence ; et qu’en tout état de cause, ni un possible engagement de poursuites aux fins de faire respecter par le père l’obligation alimentaire qui lui incombe s’agissant de ses enfants ni aucune autre considération ne sauraient exonérer le préfet de ses obligations.

Le juge enjoint au préfet d’héberger la famille dans un délai de 24 heures.        


o   TA Nantes, 20 février 2015, n°1501375

Madame, en situation irrégulière et dépourvue de toute ressource, est enceinte de 8 mois et sans solution d’hébergement malgré des démarches actives auprès des services en charge de l’hébergement. Si elle a pu bénéficier d’hébergements ponctuels et précaires (compatriotes, prolongation prise en charge hospitalière), le juge considère que « l’extrême précarité de sa situation, sa grossesse à risque imposant un suivi hebdomadaire et dont le terme est proche, le caractère aléatoire des hébergements dont elle a bénéficié depuis trois semaines établissent l’existence d’une situation d’urgence ».

Le juge, reconnaissant la détresse médicale et sociale de Madame, et la violation de son droit à l’hébergement d’urgence comme liberté fondamentale du fait de l’absence de proposition d’hébergement, enjoint au préfet d’héberger Madame dans un délai de 24 heures.

URGENCE A HEBERGER UN DEMANDEUR D’ASILE

o  TA Nantes, 13 mai 2015, n°1503937     

Monsieur est demandeur d’asile. Il se trouve sans solution d’hébergement malgré ses demandes. Il présente des problématiques de santé qui nécessitent la mise en œuvre d’un protocole de traitement régulier. Après avoir expressément accepté d’être hébergé en CADA, il ne s’est vu proposer aucune place dans une telle structure.

Le juge reconnaît qu’il « justifie d’une situation d’urgence du fait des conséquences dommageables susceptibles de découler d’un séjour prolongé hors de tout logement pérenne ». Il considère qu’en ne l’hébergeant pas, le préfet porte atteinte à ses droits en qualité de demandeur d’asile. Il enjoint au préfet d’héberger Monsieur dans un délai de 48 heures. 

 

PRISE EN COMPTE DE L’INTERET SUPERIEUR DE L’ENFANT

o  TA Caen, 23 juillet 2015, n°1501348      

Un couple et leurs trois enfants de 4, 6 et 8 ans, sans solution d’hébergement malgré des démarches auprès des services de la veille sociale, sont contraints de vivre dans un squat dans des conditions de vie indignes. Ils font l’objet d’une procédure d’expulsion, au motif de l’occupation sans titre de ce lieu.

Le juge, saisi dans le cadre d’un référé-suspension, rappelle, sur le fondement de l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant, l’obligation pour l’autorité administrative « d’accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ».

Le juge reconnaît la détresse dans laquelle se trouve cette famille au regard des dispositions du CASF et se fonde sur ces mêmes dispositions ainsi que sur l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant pour suspendre le refus d’héberger de l’administration et enjoindre au préfet d’héberger la famille dans les meilleurs délais.

 

DROIT DE PREEMPTION URBAIN

 

DROIT DE PREEMPTION URBAIN ET POLITIQUE LOCALE DE L’HABITAT

o   CE, 2 novembre 2015, n°374957            

Par une décision du 4 août 2011, le maire exerce son droit de préemption sur un bien en vue de réaliser un programme d’habitation sociale d’environ 35 logements.

Une société immobilière demande l’annulation pour excès de pouvoir de cette décision.

Saisi de la légalité de cette décision, le Conseil d’Etat considère qu’un « projet de construction de 35 logements eu égard à son ampleur et à sa consistance, présente par lui-même le caractère d’une action ou d’une opération d’aménagement », et que la mise en œuvre d’une politique locale de l’habitat « peut justifier l’exercice du droit de préemption ». Il précise que le fait que la commune ait atteint les objectifs fixés en termes de logements sociaux est sans conséquence.