Rejet de la demande d’expulsion fondée sur des troubles de voisinage ne constituant pas une atteinte suffisamment grave aux obligations du locataire

TJ de Paris, jugement du 12 mai 2022, n°11-22-002098

M.R. est assigné par son bailleur qui demande au juge de constater l’acquisition de la clause résolutoire ou à titre subsidiaire de prononcer la résiliation judiciaire du bail aux torts du locataire, en raison de troubles de voisinage dont Monsieur serait à l’origine. Il fait valoir que le chien de Monsieur a été laissé en liberté dans les parties communes où il a déféqué, que de fortes odeurs émanent de son appartement. Il indique qu’un rappel de ne pas troubler la jouissance des autres occupants

a d’abord été adressé au locataire, puis une sommation visant la clause résolutoire de cesser ces troubles. Il affirme que les troubles n’ont pas cessé puisqu’un départ de feu provoqué par négligence a été signalé dans son appartement postérieurement à ces avertissements.

Le locataire fait valoir qu’il a connu une longue période de dépression et un burn-out, et, s’il reconnaît les manquements, estime que ceux-ci ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résiliation du bail. Il précise que les troubles n’ont pas perduré au-delà de la sommation qui lui a été délivré. Il admet le départ de feu, lié à une cigarette mal éteinte, mais rappelle qu’il a immédiatement appelé les pompiers et qu’aucun dom- mage matériel pour le bailleur ni pour le syndicat des copropriétaires n’est à déplorer.

Le juge relève d’une part que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire ne sont pas acquises, puisque si cette dernière prévoit la résiliation immédiate du bail en cas de troubles de voisinage, c’est à la condition que ceux-ci soient « constatés par une décision de justice passée en force de chose jugée », ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

S’agissant de la demande subsidiaire de résiliation judiciaire du bail aux torts du locataire, le juge relève que si des manquements peuvent en effet être reprochés à M.R., ils restent relativement occasionnels (« au pis deux fois par an »). De surcroît, « la majorité des reproches, y compris par une occupante de l’immeuble, sont relatés de manière indirecte, sans que les personnes écrivant le courrier en soit le témoin direct et ne fasse état de l’ampleur de la gêne occasionnée ». Au final, « les seules fautes effectives sont celles liées aux mauvais soins apportés à l’éducation du chien de compagnie, ce qui constitue une gêne réelle et un trouble apporté aux occupants de l’immeuble, comme aux biens du syndicat des copropriétaires (…). Cependant, au regard de la disparité dans le temps des faits reprochés, ils ne peuvent atteindre la gravité suffisante permettant de résilier le bail ».

Dans ces conditions, le bailleur est débouté de l’ensemble de ses demandes.

TJ de Paris, jugement du 12 mai 2022, n°11-22-002098