OCTROI DE 3 ANS DE DELAIS A DES PERSONNES OCCUPANTES SANS TITRE D UN IMMEUBLE A CALAIS

TJ Calais, ordonnance du 25 octobre 2022, RG n°12 22 000094

Des personnes exilées occupent sans titre un immeuble dans la commune de Calais. Ce bien est abandonné depuis la mort de son propriétaire en 2015. Certains des héritiers désormais propriétaires d’une partie du bien ont sollicité le préfet pour qu’il procède à l’évacuation accélérée du lieu habité en application des dispositions de l’article 38 de la loi DALO. Le préfet a refusé de faire application de ces dispositions en raison du caractère vide et non meublé du logement, ne pouvant donc pas être qualifié de domicile. Les propriétaires ont assigné les occupants devant le tribunal judiciaire de proximité de Calais afin que le juge constate l’occupation sans droit ni titre et prononce l’expulsion.

Concernant la voie de fait, le juge rappelle que la preuve incombe au demandeur et qu’elle doit être faite en apportant des éléments matériels positifs, ce qui n’est pas le cas ici. Si les demandeurs affirment que les occupants ont coupé une chaine, les constats effectués par les forces de l’ordre ne l’établissent pas. Le juge conclut à l’absence de voie de fait.

Sur la demande de délais, le juge indique que les défendeurs « connaissent une situation personnelle, financière et professionnelle très fragile et que leur installation dans l’immeuble, objet du litige, leur a permis de se stabiliser et d’échapper ainsi aux violences endogènes des lieux de vie de campement sauvage d’une part, et aux violences liées aux opérations systématiques d’expulsion et de destruction de ces lieux de vie (appelés points de fixation par les pouvoirs publics) par la préfecture d’autre part ».

Le juge relève également que leur installation dans l’immeuble litigieux « leur a permis d’entamer des démarches, entre autres de logement ». Il précise qu’ils ont fait des recours DALO et que l’occupation de l’immeuble ne constitue qu’un « passage transitoire au cours duquel ils peuvent trouver une certaine stabilité et solidarité, comme le relèvent les associations Utopia 56, l’Auberge des Migrants, Calais Food Collective et le Secours Catholique, qui sont intervenues à plusieurs reprises au sein de l’immeuble litigieux. »

Le juge indique que le bien litigieux est abandonné depuis 7 ans et qu’il fait l’objet d’une préemption contestée devant un juge. Il ne présente toutefois pas de risques pour les occupants. Le juge conclut qu’il n’existe aucune urgence à expulser les personnes occupant l’immeuble. Il octroie donc trois ans de délai, soit le maximum possible.

TJ Calais, ordonnance du 25 octobre 2022, RG n°12-22-000094