La condamnation de bailleurs ayant soumis leurs locataires à des conditions d’habitat indigne
Plusieurs personnes morales, notamment la Fondation Abbé Pierre, se sont constituées parties civiles dans une affaire emblématique de lutte contre l’habitat indigne, survenue à Paris.
Trois personnes morales et deux personnes physique étaient poursuivies devant le tribunal correctionnel pour avoir soumis plusieurs personnes, dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance était apparent ou connu, à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine.
Les prévenus louaient aux victimes, principalement étrangères et en situation précaire, des locaux possédant des fuites et des infiltrations d’eau, des moisissures, et avec la présence de rongeurs et de cafards, des fissures aux murs et aux plafonds et des planchers affaissés.
Six infractions étaient reprochées aux prévenus, dont l’infraction pénale de soumission de plusieurs personnes vulnérables ou dépendantes à des conditions d’hébergement indignes, et d’autres infractions prévues par le code de la construction et de l’habitation, notamment :
- La mise à disposition à titre d’habitation de locaux sous emprise d’un arrêté de péril notifié ;
- La perception de sommes pour l’occupation de locaux malgré notification de l’arrêté de péril et des arrêtés d’insalubrité ;
- Des menaces ou actes d’intimidation en vue de contraindre les occupants à renoncer au droit à un relogement ou à un hébergement décent ;
- La destruction, dégradation ou détérioration de local faisant l’objet d’un arrêté de péril en vue de contraindre les occupants à quitter les lieux ;
- Le refus délibéré et sans motif légitime, malgré mise en demeure, d’exécuter sur un bâtiment menaçant ruine les travaux prescrits par l’arrêté de péril.
Le tribunal déclare coupable le premier prévenu personnes physique poursuivies des délits de soumission de personnes vulnérables à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine, mise à disposition à titre d’habitation de locaux sous emprise d’un arrêté de péril notifié, perception de sommes pour l’occupation de locaux malgré la notification de l’arrêté de péril, refus délibéré et illégitime malgré la mise en demeure d’exécuter sur un bâtiment menaçant ruine les travaux prescrits par l’arrêté de péril, et le condamne à la peine de 2 ans d’emprisonnement avec sursis probatoire pendant 2 ans.
S’agissant du second prévenu personne physique, le tribunal le déclare coupable des mêmes infractions, ainsi que de celle de destruction ou dégradation de local faisant l’objet d’un arrêté de péril dans le but d’en faire partir les occupants, de menaces ou intimidation en vue de contraindre à renoncer à un relogement ou à un hébergement décent, et le condamne à la peine de 3 ans d’emprisonnement, 50 000 euros d’amende et à l’interdiction définitive d’exercer une activité de gestion de bien immobilier.
Les personnes morales poursuivies sont déclarées coupables des mêmes délits, le tribunal ordonne la dissolution des SCI et prononce la saisie immédiate de l’ensemble des biens immeubles confisqués, et condamne une des personnes morales à la peine de 500 000 euros d’amende.
Enfin, la Fondation Abbé Pierre, la ville de Paris, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble, ainsi que 15 locataires sont reconnus dans leur constitution de partie civile et les prévenus sont condamnés à les indemniser à des dommages-intérêts.