Expulsion et ordonnance sur requête

CA Paris, 2 mars 2012, n°1110707

Une ordonnance sur requête du 7 avril 2011 conduit à l’expulsion d’un terrain appartenant au département de la Seine Saint Denis. Celle-ci est justifiée par les difficultés rencontrées par l’huissier pour recueillir les identités des occupants. L’ordonnance sur requête n’ayant pas permis aux occupants de bénéficier d’une procédure contradictoire, ces derniers ont saisi le juge des référés afin de demander son annulation, la reconnaissance de leur préjudice moral et la réintégration dans les lieux.

Le premier juge a rejeté cette demande. En appel, le juge ordonne la rétractation de l’ordonnance sur requête en retenant que les seules diligences accomplies par l’huissier pour recueillir l’identité des personnes « ne suffisent pas à démontrer [qu’elles] n’étaient pas identifiables ou qu’il était impossible de les identifier, alors en particulier que cet huissier ne s’est adressé qu’à l’une d’elles. »

En revanche, le juge ne retient pas le préjudice moral subi par les personnes, n’accorde aucun dommages et intérêts et rejette leur demande de réintégration dans les lieux.

 

>> La Cour dans cet arrêt, s’accorde sans surprise avec la jurisprudence classique selon laquelle, il ne doit pas être fait d’usage abusif de la procédure d’ordonnance sur requête, celle-ci devant rester exceptionnelle. (TGI Bobigny, 21 septembre 2001, n° 11/01168 ; CA Paris, 22 juin 2011, n° 10/19587 et n° 10/19549 )

Malgré l’annulation de cette ordonnance, nous pouvons regretter le refus de la Cour d’octroyer des dommages et intérêts au requérant et d’ordonner la réintégration sur le terrain.

L’ordonnance sur requête doit rester exceptionnelle puisqu’elle ne respecte pas le principe du contradictoire(la CEDH considère d’ailleurs que ce principe est un élément constitutif d’un procès équitable – CEDH 24 février 2011, n°33908/04, Benet Praha, Spol s.r.o. c/ République Tchèque), ce que le juge reconnaît sans en tirer les conséquences.