Droit à l’hébergement décent des occupants d’un immeuble
T.A. Cergy-Pontoise, ordonnance n°2012715 du 9 août 2021
Suite aux arrêts précités du Conseil d’Etat, l’affaire est renvoyée devant le tribunal administratif. L’une des familles, composée de cinq personnes dont trois enfants mineurs, formule les mêmes demandes au tribunal.
Celui-ci commence par écarter la fin de non-recevoir opposée par la commune et tirée de ce que la requête est dirigée contre une décision inexistante, au motif que les témoignages circonstanciés démontrent l’existence d’une décision verbale. Le juge précise qu’en l’espèce il s’agit d’une obligation d’hébergement décent car l’interdiction d’habiter est temporaire. Concernant la condition d’urgence il retient qu’elle est remplie car : « (…) à la suite de l’évacuation de l’immeuble dont elle est occupante, Mme, qui a sollicité les services du 115, a été prise en charge par différentes structures d’hébergement d’urgence et accueillie, en dernier lieu, à l’hôtel situé à Rueil-Malmaison, dans une chambre qu’elle occupe avec son époux et ses trois enfants. ». Il ajoute que : « (…) l’hébergement de Mme, outre son caractère précaire, n’est pas adapté à la composition de sa famille et à ses besoins, et que ces conditions de logement préjudicient à la santé, au développement et à la scolarité des enfants. ».
Le juge rappelle ensuite que les personnes visées par l’article L521-1 du CCH doivent bénéficier d’un hébergement décent indépendamment des conditions de leur séjour en France. Or, la décision de refus contestée ayant été prise au motif que la requérante est en situation irrégulière sur le territoire, le juge en déduit qu’il existe bien un doute quant à sa légalité. Enfin, la commune demande à nouveau une substitution de motif en avançant que la requérante ne disposait pas d’un titre d’occupation régulier et dès lors ne pouvait pas être considérée comme étant de bonne foi. Le juge relève cependant que celle-ci s’est régulièrement acquittée du loyer jusqu’à l’application de la procédure de péril, qu’elle a souscrit une assurance habitation pour le logement, un contrat de fourniture d’électricité, et l’a déclaré comme son domicile principal auprès de l’administration fiscale pour l’établissement de la taxe d’habitation. Par conséquent il retient que la requérante est une occupante de bonne foi au sens de l’article L521-1 précité, et rejette la demande de la commune. Le juge enjoint à la commune de proposer un hébergement décent et correspondant aux besoins de la requérante dans un délai de 21 jours. Néanmoins, il retient que la suspension de la décision ne peut pas avoir pour conséquence de condamner la commune à verser une indemnité de relogement ni de l’enjoindre à restituer les effets personnels de la requérante laissés dans l’immeuble placé sous interdiction d’accès et d’occupation.