Actualité jurisprudentielle 2011 – habitat indigne

Remboursement des loyers versés avant l’arrêté préfectoral

  • TI, Anthony, 20 janvier 2011

Mme loue en mars 2007 un studio en entresol qui est déclaré impropre à l’habitation en octobre 2007. En janvier 2011, le juge du TI condamne le bailleur à rembourser les sommes versées depuis l’entrée dans les lieux jusqu’à l’arrêté (date de la suspension des loyers) ainsi que le dépôt de garantie.

Cette décision n’est pas isolée : Voir : TI, Paris, Xie, 12 janvier 2010 et TI, Anthony, 14 janvier 2010 (site Jurislogement : Qualité de l’habitat).

Trouble de jouissance et détermination des dommages et intérêts

Le juge constate que le locataire, qui a quitté les lieux, est débiteur de la somme de 6921 euros au titre des loyers indus. En revanche, le trouble de jouissance qu’il invoque au titre de divers dégâts ( dégâts de eaux qui ont entraîné des infiltrations, une fissure ouverte sur l’extérieur qui est apparue, des fenêtres qui n’assuraient plus l’isolation du logement et une installation électrique qui était défaillante) ont causés un préjudice de jouissance certain de l’ordre de 12 000 euros.

Nullité d’un congé donné avant la prise de l’arrêté préfectoral interdisant l’occupation en application de l’article 1719 du Code civil

Le propriétaire délivre un congé au locataire d’une studette meublée située en demi sous-sol en avril 2009 pour le 4 janvier 2010. Un arrêté du 18 janvier 2010 met en demeure le propriétaire de faire cesser l’occupation. Le propriétaire assigne son locataire aux fins de validation du congé. Dans son jugement du 3 février 2011, le juge estime que le contrat est vicié dès sa conclusion en raison du caractère impropre à l’habitation du logement loué et qu’il ne peut dès lors pas se prévaloir de la résiliation du bail pour demander l’expulsion. En outre, la procédure d’insalubrité étant déjà engagée, le propriétaire ne pouvait pas se soustraire à son obligation de relogement. Le congé est alors annulé et le propriétaire est condamné à rembourser le loyer de janvier 2010 et à payer la somme de 4000 € de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices de jouissance et de son préjudice moral.

Condamnation sous astreinte à réaliser les travaux, à délivrer des quittances et à rembourser 30% des loyers versés

Monsieur B.  locataire depuis octobre 1998 d’un logement pour lequel la direction du logement et de l’habitat a mis en demeure le bailleur d’effectuer des travaux en mars 2008. Les divers désordres ont été confirmés ensuite par un expert judiciaire.  Dans son jugement du 31 mars 2011, le tribunal condamne le bailleur à réaliser les travaux décrits par l’expert et considérant son peu d’empressement à satisfaire à ses obligations malgré les mises en demeure des services de la Ville de Paris, le juge y ajoute une astreinte de 500 euros par mois de retard dans un délai de 2 mois à compter de la signification du jugement. Le juge condamne également le bailleur à verser 10 600 euros à Monsieur B. au titre du trop versé (abattement de 30% du loyer préconisé par l’expert), 1 510 euros au titre du préjudice de jouissance et 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, et enfin, ordonne la délivrance de quittance de loyers sous astreinte de 250 euros par mois de retard.

Le caractère indécent du logement ne peut justifier la résiliation du bail et l’expulsion

Dans l’acte de vente par lequel la SCI est devenue propriétaire du logement en cause, la locataire est considérée comme occupant le bien sans titre en raison de son refus de quitter ce logement hors norme. Le juge indique que la SCI ne peut soutenir que le caractère indécent du logement constitue une cause extérieure et un cas de force majeure justifiant l’expulsion. La locataire, relogée dans le parc HLM au moment de l’audience, demande des dommages et intérêts pour trouble de jouissance et soutient que les propositions de relogement ne correspondaient pas à ses capacités financières ni à ses besoins. La SCI n’ayant accepté aucun loyer, le juge n’accorde pas de dommages et intérêts sur les conditions d’habitation. En revanche, l’attitude du propriétaire lui a causé des inquiétudes justifiant un somme de 2800 euros de dommages et intérêts.

Définition de la hauteur des combles

  • CE, 4 mars 2011, n° 336243

L’arrêté préfectoral mettant en demeure, au regard de l’article L. 1336-3 du code de la santé publique, le bailleur de faire cesser l’occupation des combles est contesté par celui-ci. La cour d’appel pour annuler cet arrêté estime que la hauteur des combles n’était pas manifestement insuffisante. Le Conseil d’Etat casse la décision d’appel considérant « qu’il ne résulte pas de l’article L. 1336-3 du code de la santé publique que la hauteur sous plafond doive être « manifestement » insuffisante ».

Lutte contre l’insalubrité et droit de propriété : Question prioritaire de constitutionnalité

  • CE, 9 mai 2011, n°346785

Suite à un arrêté préfectoral ordonnant au propriétaire de mettre fin à l’habitation des personnes locataires et de les reloger, ce dernier a saisi le tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de l’arrêté en question. Lors de ce contentieux, le Conseil d’Etat statue sur l’éventuel renvoi d’une question au Conseil constitutionnel concernant la compatibilité avec les droits et libertés fondamentaux de l’article 1331-22 du code de la santé publique. Le Conseil d’Etat estime que ces mesures sont des restrictions au droit de propriété justifiées par l’intérêt général qui s’attache à la protection de la santé et à la sécurité des occupants. Il considère que ces mesures n’empêchent qu’un type de mode d’occupation et pas d’autres formes d’usage ni l’accès au local. Cette question n’étant par ailleurs pas nouvelle, elle n’a pas lieu d’être déférée au Conseil constitutionnel.

Rappel : l’article 1331-2 du CSP prévoit l’inhabitabilité des caves, sous-sol, etc, et la procédure de mise en demeure éventuelle de faire cesser ce type de location par le préfet.