Les précisions du Conseil d’Etat sur la circulaire relative à l’examen des situations administratives dans l’hébergement d’urgence

CE, 11 avril 2018, n°417206

Le 12 décembre 2017, le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Cohésion des territoires ont pris une circulaire mettant en place un dispositif de suivi des personnes étrangères accueillies dans les structures d’hébergement d’urgence, par des agents de l’OFII et de la préfecture. Après avoir rappelé le principe de l’inconditionnalité de l’accueil, la circulaire précise que le maintien en hébergement est subordonné à une évaluation de la situation ; mais réduit l’évaluation des situations personnelles à une simple évaluation de leur situation administrative. Pour ces contrôles, des acteurs sociaux ne se joindront aux équipes de l’OFII et de la préfecture « seulement en fonction des ressources mobilisables et du contexte local ».

Ces évaluations doivent permettre une orientation « adaptée » des personnes hébergées, en fonction de leur situation au regard du droit au séjour. L’objectif est d’orienter les demandeurs d’asile vers des structures adaptées et les personnes réfugiées ou bénéficiant de la protection subsidiaire vers un centre provisoire d’hébergement puis une solution de relogement. Mais pour les étrangers en situation administrative « litigieuse », l’examen de la situation pourra conduire à la délivrance rapide d’un titre de séjour avec une orientation vers un logement ou hébergement soit, à défaut, la notification d’une OQTF pour ensuite organiser un retour, de façon volontaire ou contrainte. La circulaire ne mentionne cependant pas d’expulsion des centres ni des modalités de mise en œuvre des préconisations, notamment en cas d’OQTF.

Un ensemble de structures associatives a saisi le Conseil d’Etat afin que ce dernier annule cette circulaire en recours pour excès de pouvoir (faisant suite à un référé-suspension). Le Conseil d’Etat a rejeté le pourvoi des associations mais en a limité l’application en considérant qu’elle ne conférait aux agents « aucun pouvoir de contrainte […] à l’égard des personnes hébergées ou des gestionnaires des lieux d’hébergement ». Le Conseil d’Etat constate également que « cette circulaire [ne constitue pas] un titre pour pénétrer dans des locaux privés hors le consentement des personnes intéressées ». Il rappelle la place de la circulaire dans la hiérarchie des normes en précisant qu’elle « ne saurait davantage permettre de déroger aux dispositions législatives et réglementaires ». Le Conseil d’Etat rappelle l’importance du respect de la protection des données personnelles en pointant ensuite qu’elle n’a « ni pour objet ni pour effet de dispenser du respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ».

Rappel : Une décision du Conseil d’Etat en référé a été rendue en février 2018 – A retrouver dans la veille du 1er trimestre 2018.